Noeux Environnement

Le paillis un jour, le paillis toujours ! (enfin presque)

Pourquoi pailler ?

Le paillage se définit par l’action de couvrir le sol avec des matériaux divers.

Cette pratique a pour but de protéger les cultures des intempéries et d’empêcher le développement des herbes indésirables. Les matériaux organiques, en se décomposant auront également pour effet d’enrichir le sol. Elle s’inspire de la logique du vivant, le meilleur exemple est la forêt qui n’est jamais « à nu ».

Le paillage amoindrit les conséquences d’une canicule, à savoir un réchauffement excessif et un dessèchement du sol (avec une terre durcissant jusqu’à l’apparition de crevasses).

Il aide à retenir les eaux de pluie et évite le ravinement en cas de fortes précipitations.

Il limite l’évaporation.

Il atténue l’effet des brusques variations de température et protège ainsi les habitants du sol.

Tomates paillées avec l'herbe fauchées aux abords des planches de culture

 Tout au long de cet article, nous citerons des passages du Manuel pratique de la culture maraîchère de Paris, excellent ouvrage écrit au 19ème siècle par les maraîchers parisiens ,qui ont rendu la capitale autosuffisante en légumes durant la seconde moitié du 19ème siècle.

« Bons effets du paillis. _ Un paillis empêche la surface de sécher, de se crevasser ou de se fendre; il la tient fraîche ; il fait que l’eau des arrosements ne s’écoule ni à droite ni à gauche, qu’elle pénètre à l’endroit où on l’a versée, et s’oppose à son évaporation. Sans paillis, nous serions obligés de tripler les arrosements, et encore les légumes ne viendraient pas aussi bien».

Les gains sont donc multiples : économies d’eau (thématique plus que jamais d’actualité) et d’énergie en terme de temps et de main d’œuvre. La productivité s’en trouve accrue. A noter également la réduction importante du désherbage du fait que la surface offre un terrain moins propice à l’établissement des graines d’adventices. Enfin, rappelons que le paillis n’entraînera pas de perte de nutriments contrairement au compost qui perd des nutriments lors du processus.

Cependant, cette technique pourtant simple nécessite une certaine connaissance du « terrain » et de la saisonnalité :

« Cependant le paillis a, selon nous, un petit inconvénient, qui fait qu’on ne doit le répandre sur les planches avant la fin avril ou le mois de mai ; c’est qu’il attire l’humidité plus que le terreau ; que si des légumes tendres sont plantés de bonne heure, des laitues, par exemple, dans une planche couverte d’un paillis, les petites gelées tardives du printemps leur feraient plus de mal que si elles étaient dans une planche couverte du terreau ; c’est pourquoi nous terreautons, mais ne pas paillons pas les planches ou côtières que nous plantons avant la fin avril. »

Ajoutons à cela que pailler au printemps ralentit le réchauffement du sol et donc la croissance des premiers légumes. Il est également très attractif pour les limaces, en pleine activité à ce moment de l’année.

Préparer les matériaux

Les matériaux destinés à nourrir le sol peuvent être broyés afin d’en accélérer la décomposition. Par contre, ceux plutôt destinés à protéger le sol seront épandus sans broyage préalable (meilleure aération).

Technique d’arrosage et utilisation de l’eau

Comme nous l’avons vu précédemment, le paillis est une manière efficace d’économiser l’eau et d’en tirer le meilleur parti. Il est cependant important d’apporter quelques précisions sur l’utilisation de l’eau.

Quand arroser ?

Tout d’abord, le moment de la journée est primordial.

« Il est généralement reconnu que les arrosements du matin et du soir sont les meilleurs. Le soleil venant échauffer la terre arrosée le matin, les planches sans aucun doute, doivent s’en trouver bien. Les arrosements sont bons en ce que les plantes ont soif après une journée chaude, en ce que l’eau a le temps de pénétrer pendant la nuit et de rafraîchir les racines des plantes avant d’être excitée à s’évaporer au soleil du lendemain ; mais, quand les nuits deviennent froides et longues, les arrosements du soir ne sont plus d’un aussi bon effet, ils peuvent au contraire, ralentir ou suspendre la végétation, par la fraîcheur de leur eau jointe à celle de la nuit ».

La température a-t-elle une importance ?

Il ressort donc de ces propos que la température est un facteur déterminant dans la croissance des végétaux. Le choc thermique en résultant est à prendre en considération.

« Nous savons que l’eau de nos puits est trop froide et que, si elle était à la température de l’eau de rivière, elle serait bien meilleure pour nos arrosements ; mais nous sommes obligés de l’employer telle que nous l’avons : seulement l’expérience nous a appris que quelques légumes, à certaine époque de leur croissance, la craignent quand le soleil luit chaudement ».

Par extension, l’eau provenant du robinet est également froide. Il est donc recommandé, si vous en avez la possibilité, d’arroser avec de l’eau de pluie provenant d’une cuve, qui sera à température ambiante, évitant ainsi le choc thermique.

Pailler pour enrichir du sol

« Au moyen  des arrosements, les parties alimentaires du terreau et du paillis se dissolvent, sont entraînées par l’eau dans la terre, nourrissent les plantes, jusqu’à ce qu’ils soient eux-mêmes enfouis et profitent à une nouvelle saison. »

Ainsi, le paillis permet d’utiliser l’eau de façon ‘ciblée’ et donc de l’économiser, l’empêchant également de s’évaporer, réduisant la fréquence des arrosages. Par ailleurs, l’arrosage du paillis nourrit la vie du sol, de manière progressive et continue à condition de maintenir une certaine épaisseur de couches tout au long de la saison. Cette combinaison encourage l’activité de la vie du sol qui, en retour, l’ameublit et l’enrichit. Il s’agit des consommateurs primaires tels que les champignons, les bactéries, les lombrics… Il est estimé que 250000 vers mangent 300 à 600 tonnes de terres sur un hectare par an.

Les matériaux riches en azote et facilement dégradables

En clair, les matériaux organiques (en particulier ceux se décomposant facilement tels que herbe, fumier, orties, consoude, algues, fanes de légumes, engrais verts) seront absorbés, digérés puis finalement transformés, par les êtres vivants du sol, en éléments nutritifs disponibles pour les plantes cultivées.

Plus particulièrement adaptés aux climats humides (effet protecteur insuffisant en zones sèches), ces matériaux conviennent bien aux légumes dont les fruits ne reposent pas sur le sol

Ils peuvent être utilisés en couches minces afin d’éviter l’asphyxie et la prolifération d’animaux « nuisibles ».

Ces matériaux se décomposant rapidement, la couche doit être fréquemment renouvelée.

Ils constituent une nourriture de qualité pour le sol tout en séquestrant le carbone (petite astuce, la couleur du sol peut vous donner quelques indications sur sa composition : brun-noir, il est riche en matière organique, couleur vive à dominante rouge, présence de fer, bleu grisâtre, sol gorgé d’eau, pâle, sol pauvre ou lessivé, blanc, pauvre en matière organique et à salinité élevée).

Notons que cette technique limite les intrants, voire les annule après quelques années et augmente ainsi la qualité du sol et des légumes tout en réduisant la charge de travail. Cette technique nous rappelle le modèle de la forêt, au sol frais et riche, où rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme !

Voici quelques chiffres pour illustrer notre propos : Théoriquement, vingt centimètres d’épaisseur équivalent à deux centimètres de compost en place (n’en mettez pas autant d’un coup sur vos légumes !). Par conséquent, fractionné sur l’année, nous parlons donc de 10 kg au mètre carré. Ce flux continu de nutriments peut être augmenté si on prend la peine de décaisser les allées (à condition de préalablement les pailler avec du BRF ou des copeaux de bois).

Les matériaux secs et grossiers 

« Il s’agit notamment de la paille et des fougères. Ce sont des matériaux à décomposition lente qui conviennent particulièrement aux sols lourds (argileux) car laissant passer l’air et absorbant l’eau (un peu comme une éponge).

Ce type de matériaux est idéal pour les fruits et légumes risquant de pourrir au contact du sol (courges, concombres, melons, fraises…).

Pour les cultures gourmandes, on pourra utilement, préalablement à la couche de paille, étaler du compost mûr. »

Nous pouvons ajouter à cette liste le Bois Raméal Fragmenté (BRF), qui couvrent nos allées (voir photos).

Les matériaux minéraux

Citons des matériaux comme la pierre ; les tuiles cassées ou encore les bâches plastiques.

Ces matériaux, bien qu’efficaces pour empêcher le développement des herbes indésirables, n’auront évidemment aucun effet sur l’enrichissement du sol.

Un cas particulier, la faim d’azote.

Voici la définition que propose Wikipedia sur le sujet :

« En agronomie, la « faim d’azote » ou encore appelée effet dépressif est une utilisation de l’azote du sol par les micro-organismes qu’il contient, pour décomposer un apport récent de matière organique déposé en surface ou enfoui dans le sol, lorsque cet apport se révèle trop riche en carbone et trop pauvre en azote (branches, feuilles, compost trop ligneux …). La décomposition de la matière organique insuffisamment mûre et mal décomposée, avec un rapport C/N trop élevé, va mobiliser temporairement l’azote du sol aux dépens des plantes en place, en particulier pour les jeunes plantes. Ce sont les champignons et les bactéries, à l’origine de ce processus naturel de minéralisation, qui vont puiser l’azote. Cette carence provisoire d’azote dans les cultures se manifeste par un arrêt de la croissance des plantes et parfois un jaunissement du feuillage (chlorose). L’effet dépressif n’est que provisoire : il dure autour de 6 mois. Il prend fin lorsque toutes les matières organiques sont bien décomposées, transformées en humus. Les micro-organismes meurent alors en restituant l’azote qu’ils ont utilisé»

Comme vous pouvez le constater sur les images, on retrouve cet aspect chétif aux feuilles jaunies. Les photos suivantes ont été prises sur le même site à la différence près que des tontes de gazon (riches en azote) ont été utilisées comme paillis en plus du BRF. Ce paillis avait été déposé l’année dernière.

La faim d’azote aurait dû arriver au début du printemps mais avec un temps sec et les fortes chaleurs que nous avons connus l’activité du sol n’a pas pu faire son œuvre comme escompté.

En conclusion, un sol riche et fertile donne de beaux et savoureux légumes, un véritable océan de verdure ! Nous ne pouvons pas résister à vous montrer quelques photos de légumes surpris en train de pousser à l’abri de plantes compagnonnes !

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